B, comme buée et bugado
Ma grand-mère paternelle était une femme « moderne », je ne l’ai jamais vue faire la lessive à la main elle-même. A l’usine où mon grand-père travaillait il y avait une énorme laverie, dont les ouvriers pouvaient disposer à chacun leur tour, ma grand-mère en a usé et abusé !
Un peu comme celle-ci :
Ma mère, dès qu’il y eut des « machines » en a acheté une, sinon pour les draps le blanchisseur passait chaque semaine. Sept personnes à la maison ça en fait du linge et des draps.
La seule qui ne voulait rien de « moderne » était ma grand-mère maternelle. Avant son évacuation vers la « ville » pendant la guerre, elle habitait « au village » où elle était « lessiveuse-repasseuse », elle faisait tout elle-même.
Elle trempait son linge dans un grand cuvier avec de la cendre, ensuite rinçait et y mettait du « bleu » … faisait bouillir doucement pendant des heures et des heures, ça sentait le savon bouilli, c’était tenace comme odeur, ça faisait de la buée partout… d’ailleurs on appelait ça dans le Nord « faire sa buée », en Provence on dit « la bugado ».
La « bugado » musée du terroir de Marseille Château-Gombert
Je la revois encore faire ces taches si dures, mais elle ne voulait jamais d’aide, elle brossait le linge sur une planche, elle n’a jamais voulu que ma mère lave ses draps dans sa machine, elle disait que laver tout en même temps ça n’était pas propre…
Comme elle avait un jardinet, elle faisait sécher ses draps sur l’herbe, nous étions gamins on trouvait ça un peu rigolo. Surtout il ne fallait pas toucher.
Elle repassait les chemises de son fils qui habitait avec elle avec des fers en fonte ! A l’heure du fer électrique, rendez vous compte !
Elle amidonnait les poignets, les repassait et les mettait en forme arrondie un ruban autour pour qu’il n’y ait aucun pli !
La repasseuse, Edgar Degas
Quand on y repense, c’était un travail harassant, mais elle était fière de ce travail.
c’est bizarre la vie quand même.
Selma cayol